lundi 31 mars 2014

Hercule contre les vampires (Mario Bava et Franco Prosperi, 1961)



L'usurpateur Lico (Christopher Lee), souverain d'Ecalia, a envoûté Déjanire, la fiancée d'Hercule (Reg Park). Pour la guérir, il doit se rendre aux Enfers avec l'aide de son ami Thesus et de Télémaque afin d'y trouver la pierre de vie. Mais avant, Hercule doit s'emparer de la pomme d'or cachée sur un immense arbre du jardin des Héspérides.

Point de vampire à l'horizon dans ce péplum dont les distributeurs, probablement ceux qui quelques années plus tard renommeraient Django ou Trinita des westerns sans rapport avec les héros sus-cités, louchaient sans doute avec opportunisme du coté de la Hammer ou Christopher Lee avait pu s'illustrer dans le rôle du comte Dracula. Bien que son personnage ne soit ici qu'un sorcier assez banal, il s'agit du péplum poussant le plus loin les influences fantastiques qui venaient ici et là se greffer aux films de Cottafavi ou Francisci, dont Bava fut le directeur de la photographie. Durant une heure vingt, Hercule contre les vampires est un festival de délires chromatiques, de couleurs saturées et d'effets de style (les apparitions furtives de Lico, les mains tentant de sortir des tombes) pour le moins incongrus dans l'univers du péplum. Pour un budget réduit qui ne fut que sa deuxième réalisation officielle après Le Masque du démon - il aurait toutefois collaboré entre autres aux Vampires de Freda et à la Bataille de Marathon de Tourneur - le brio visuel est d'autant plus impressionnant et sur ce plan, il s'agit du film le plus abouti de la série Hercule. Hélas, on n'en dira autant ni du scénario ni de l'interprétation.



Là ou Cottafavi avait su brillamment combler les lacunes de Reg Park en faisant de son personnage un héros attentiste et pratiquement pacifiste, ici Hercule traverse le film avec un regard donnant l'impression de ne pas trop savoir ou il est. Les scènes qui auraient nécessité une véritable dramaturgie en pâtissent énormément (la perte de son compagnon préféré semble le laisser indifférent) et Bava n'arrange rien en l'affublant d'un sidekick comique réussissant à taper sur nos nerfs encore plus fortement que l'Ulysse des deux premiers opus. Christopher Lee est évidemment meilleur mais il est loin de ses performances Hammeriennes ou de celle qu'il donnera pour Le corps et le fouet du même réalisateur. Les péripéties s’enchaînent sans grande logique narrative si ce n'est de permettre à Bava de multiplier les filtres colorés et les menaces improbables, dont un homme de pierre absolument grotesque, des fantômes plus réussis et un beau moment ou Hercule manque de peu de se faire broyer dans une sorte de montagne. Il est en revanche dommage qu'Hercule résolve la quasi-totalité des problèmes à coups de pierre en pleine face et on aurait apprécié un peu plus de variété dans ses techniques de combat.



Hormis l'excellent Hercule à la conquête de l'Atlantide, les scénarios des Hercule précédents n'étaient jamais des merveilles de psychologie mais ils parvenaient à équilibrer l'univers mythologique et la fantaisie. En plongeant tête la première dans un univers aux accents baroques, Bava perd de vue ses personnages qui en deviennent des pantins monolithiques auxquels on peine énormément à s'attacher. Il semble d'ailleurs beaucoup moins inspiré lors des scènes " naturelles " mais leur nombre très réduit rend ce problème accessoire.
Au fond, le principal défaut de cet opus est d'avoir été réalisé par un cinéaste qui donnera un bon nombre d’œuvres plus convaincantes à l'esthétique similaire ; pour rester dans le domaine coloré et grand-guignolesque, le giallo Six femmes pour l'assassin est plus cohérent esthétiquement et bien plus travaillé dans son intrigue. Il reste toutefois le chant du cygne d'une série dont les réductions de budget, le succès décroissant et les interprétations défaillantes allaient rapidement aboutir à une chute qualitative conséquente. Quant à Bava, il s'imposerait facilement comme l'un des plus talentueux cinéastes italiens des années 60, prouvant ici que même un de ses films les plus mineurs peut toutefois éclipser la majeure partie de la concurrence.

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