vendredi 28 mars 2014

Django le bâtard (Sergio Garrone, 1969)



Django (Anthony Steffen), ancien soldat confédéré, a été laissé pour mort lorsque trois officiers ont trahi leurs hommes et laissé ceux-ci se faire massacrer par les nordistes. Seize ans plus tard, Django entreprend sa vengeance. Ses adversaires se demandent si Django est bel et bien un être vivant.

Le plus célèbre western de Sergio Garrone s'inscrit dans un sous-genre intéressant, celui du western fantastique, au sens donné par Tzvetan Todorov dans son Introduction à la littérature fantastique : un point d'incertitude entre le domaine du réel et celui du merveilleux. Ainsi, la question de l'humanité de Django sera laissée sans réponse et si celui-ci semble doté de pouvoir surnaturels (notamment la téléportation) tout cela peut très bien être du à la fatigue ou à des hallucinations de ses proies.

Le cinéaste ayant le mieux synthétisé l'esthétique du western et celle du fantastique italien est certainement Antonio Margheriti, d'ailleurs essentiellement connu des cinéphiles pour ses œuvres gothiques (La Danse macabre, La Vierge de Nuremberg). Son diptyque spaghetti, composé du raté Avec Django là mort est là et du bien meilleur Et le vent apporta la violence contenait également des héros vengeurs aux capacités quasi-surhumaines. Mais là ou Margheriti jouait sur les décors et le son (incroyable scène de Et le vent apporta la violence ou un pianiste abattu à bout portant continue à jouer) pour créer une ambiance fantasmagorique, Garrone se contente de multiplier les démonstrations de force de son héros. D'où un film très répétitif car passé le relatif effet de surprise du premier temps, l'ensemble se révèle être ni plus ni moins qu'une grande partie de cache-cache trop étirée dont Django ne peut que sortir vainqueur.



Si les scripts de westerns transalpins ont rarement brillé par leur originalité, celui-ci aligne les poncifs avec une régularité de métronome. Un méchant attardé blond sadique qui renvoie aux fils de bonne famille dégénérés de chez Fulci, un héros en poncho singeant Clint Eastwood et qui achète des tombes avant d'abattre ses ennemis comme celui-ci dans Pour une poignée de dollars... Pourtant, en dépit de son manque criant de progression narrative, le film se suit avec un certain intérêt et Garrone remplit son cahiers des charges de gunfights, de moments de cruauté et d'apparitions furtives de Django.

Anthony Steffen est un acteur assez médiocre mais le scénario évite de le faire trop parler (défaut gâchant en grande partie Avec Django, la mort est là) et sans atteindre le charisme d'un Klaus Kinski ou d'un Franco Nero qui restent imbattables dans ce type de rôle, il reste bien plus convaincant que Richard Harrison. Il se fait toutefois voler la vedette par un Luciano Rossi totalement déchaîné en psychopathe déficient mental qui curieusement parait être le seul à pouvoir inquiéter Django. L'espace d'une scène dans laquelle Rossi tente de pendre Django, Garrone trouve également une rigueur du cadre et une efficacité du montage qui tendent à prouver que le cinéaste est capable d'accomplir de belles choses à l'occasion. Pour le reste, on navigue entre une horde de sbires tout juste bons à se faire surprendre toutes les cinq minutes, un personnages féminin dénué du moindre intérêt et un trio d'officiers trop faiblement caractérisés. La musique est un plagiat morriconien sans grande imagination mais on peut apprécier le fait que contrairement à d'autres réalisateurs, Garrone a le mérite de ne pas en abuser. Django le bâtard n'est pas la plus passionnante des fausses suites de Django mais il demeure une tentative intéressante quoique inaboutie de fusion de deux genres. Pour ceux qui ne le connaissent pas encore, on vous recommandera avec vigueur le superbe Et le vent apporta la violence qui est peut-être le western italien le plus sous-estimé.



Notons que cette veine fantasmagorique semble, sans doute encore plus que les westerns de Leone, avoir inspirée Clint Eastwood pour son L'homme des hautes plaines dont le héros fantomatique avait beaucoup à voir avec les vengeurs italiens. A l'instar du Une raison pour vivre, une raison pour mourir de Tonino Valerii, le film de Garrone est également connu sous le titre La Horde des salopards qui est ici complètement dénué de sens.

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