Tom Newcliffe (Calvin Lockhart) réunit cinq invités dans sa luxueuse propriété : un scientifique, un diplomate, un artiste raté et un couple composé d'un concertiste et de sa femme. Newcliffe est convaincu que parmi les convives se cache un loup-garou, et il entend bien découvrir lequel.
Lorsque l'on évoque le cinéma fantastique anglais, le premier nom venant immédiatement à l'esprit est celui de la Hammer. Ainsi, on oublie par exemple la société Tempean Films fondée par Monty Berman et Robert S Baker (créateur de la série Amicalement Votre ! ) qui donna au film fantastique quelques belles réussites dans les années 50, ou encore la Amicus, dont la spécialité était les films horrifiques à sketchs. L'œuvre de Paul Annett n'en est toutefois pas un, mais se révèle une atypique tentative de mélanger trois genres très différents. L'intrigue principale autour de la lycanthropie renvoie évidemment au fantastique et notamment à l'un des plus beaux films de la Hammer, La Nuit du loup-garou ; le fait qu'un groupe de personnages soit isolé du reste du monde et qu'un meurtrier se cache parmi eux fait quand à lui beaucoup penser aux romans d'Agatha Christie, alors que l'étonnante présence de l'acteur noir Calvin Lockhart en héros semble surfer sur le phénomène blaxploitation alors en cours aux Etats-Unis.
On le voit, la synthèse opérée par le script peut sembler curieuse. L'intrigue est ainsi contemporaine et a lieu autour d'une maison truffée de dispositifs de sécurité modernes (micros, vidéo-surveillance) déployés par Newcliffe pour s'assurer que la bête soit prise au piège. Et si la greffe prend plutôt bien lors du premier tiers, il apparaît rapidement que le script échoue à tenir le spectateur en haleine durant une heure et demie.
En effet, la trame policière nécessite un minimum d'indices, de faits révélés au spectateur afin de lui permettre de rechercher le coupable. Ici nous n'avons que des informations extrêmement limitées sur les cinq invités, et le scénario ne réserve pratiquement aucune interaction entre eux, aucune confrontation. La volonté de resserrer l'intrigue sur le personnage de Calvin Lockhart fait que les seconds rôles sont traités de manière stéréotypée et que faute de choisir entre récit de détective et film d'action, The Beast Must Die n'est convaincant sur aucun de ces deux plans.
En dehors de Lockhart, héros trop sur de lui pour attirer la sympathie, on retrouve avec plaisir Peter Cushing dans un rôle improbable de professeur originaire d'Europe du nord (d'ou un accent extrêmement curieux pour les spectateurs habitués aux rôles so british habituels de l'acteur) et Anton Diffring dans celui de l'assistant de Lockhart ; les amateurs de James Bond reconnaîtront également Charles Gray, Blofeld dans Les diamants sont éternels, l'un des invités au comportement les plus suspects. Sans être mauvais, tous ont connu de plus grands rôles et semblent ici cachetonner tranquillement. A leur décharge, la superficialité de leurs personnages ne permet pas non plus aux acteurs de s'exprimer à leur maximum.
Dernière déception : la créature. Gros chien noir pas effrayant pour un sou, elle échoue à provoquer un semblant de terreur lors de ses apparitions, et ce d'autant plus que la violence est très édulcorée. La meilleure scène du film est d'ailleurs celle d'introduction dans laquelle Lockhart est poursuivi par des hommes le traquant, sans sembler pouvoir s'échapper nulle part, avant que le spectateur n'apprenne qu'il ne s'agissait que d'une mise en scène dans le but de tester l'efficacité de son dispositif de sécurité ; mais lorsque dans un film de loup-garou, le moment le plus efficace est sans rapport direct avec la créature, il est probable que l'objectif principal ne soit pas tout à fait atteint.
A noter un gimmick rappelant furieusement ceux du cinéaste William Castle : l'intrigue s'arrête une dizaine de minutes avant la fin et invite le spectateur à donner son avis sur l'identité du ou de la coupable, avec trente secondes comme temps de réflexion. L'auteur de ces lignes, peu friand des whodunit, tient à indiquer qu'il est fier d'être tombé juste.
En résumé, The Beast Must Die est un film plus intéressant par son idée de départ que par ce qu'il procure réellement lors du visionnage. Il reste une pièce sympathique et originale de l'histoire du cinéma d'horreur qui eut sans doute mérité un scénario plus cohérent.
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