Chong (Andy Lau), un aveugle, arrondit ses fins de mois en traquant des criminels. Ho (Sammi Cheng), une policière impressionnée par la science déductive de Chong, lui demande de l'aider à retrouver une de ses amies disparue.
Drug War, le précédent film du cinéaste, était un éblouissant retour en forme dont la non-distribution dans nos contrées fut un véritable scandale, surtout au vu des précédentes productions Milkyway moyennes (Sparrow, Vengeance) ou mauvaises (La vie sans principe) qui avaient pourtant réussi à se frayer un chemin jusqu'en salles. Et si par conséquent Drug War n'a aujourd'hui toujours pas été distribué en France, gageons que sa maîtrise formelle, son efficacité et son dernier quart d'heure anthologique en feront à l'avenir un classique du polar chinois. Mais revenons-en à ce Blind Détective...
Comme souvent lorsque Wai Ka-fai est au scénario, l'histoire est un brin tortueuse. Ho est amoureuse de Chong qui est amoureux d'une jeune femme rencontrée avant qu'il ne devienne aveugle, jeune femme elle-même amoureuse du meilleur ami de Chong. Quant aux enquêtes, elles mêlent une jeune femme au pied immense très douée pour le sprint, un assassinat (en fait double) dans une morgue à coups de marteau et la traque de Minnie, l'ancienne meilleure amie de Ho. Tout cela n'est certes pas d'une limpidité absolue mais la durée du film (2h10) permet à la narration de prendre son temps et de ne pas laisser le spectateur sur le carreau. En réalité, le problème posé est beaucoup plus simple : les intrigues sont ennuyeuses et l'humour du film particulièrement laborieux.
En effet, on pourrait diviser Blind Detective en plusieurs temps ; les trois premiers quarts d'heure font la part belle au comique résultant des interactions entre le tyrannique Chong et l'enthousiaste Ho, qui pratiquent des expériences étranges afin de se mettre dans les conditions dans lesquelles les crimes ont eu lieu. On les voit donc se frapper à l'aide d'un marteau ou simuler des scènes de ménage hystériques pour mieux entrer dans la peau des protagonistes. Et si les situations sont déjà outrées et répétitives sur le papier, le fait est que Sammi Cheng est une véritable catastrophe. Perpétuellement à côté de la plaque, dénuée de charisme et franchement irritante, elle compose une héroïne extrêmement pénible. Andy Lau, bien meilleur acteur habituellement, semble d'ailleurs vouloir se mettre au niveau de sa partenaire et nous gratifie d'un cabotinage tout aussi énervant. Et comme, contrairement à la majorité des grands films de la Milkyway, les seconds rôles n'ont ici aucun espace pour exister, on reste malgré nous victimes du duo vedette qui vampirise le film durant plus de deux heures.
Le film se réveille un peu lorsque Chong et Ho partent à la chasse au double meurtrier (les amateurs apprécieront le fait de retrouver Lam Suet, malheureusement trop vite évacué du récit) avant d'affronter un psychopathe qui leur posera d'autant plus de problèmes qu'une femme et un aveugle ne forment pas le duo d'action le plus efficace au monde. Mais tout ceci est d'autant plus laborieux que si la dimension " hasards et coïncidences " est certes récurrente chez To (le final de PTU ou tous les personnages se retrouvent au même endroit, la fusillade concluant Drug War) ici les facilités narratives pleuvent et les sympathiques scènes de déduction finissent vite par donner le sentiment d'être des rustines comblant tant bien que mal un récit poussif et incohérent. La mise en scène de To a beau être aussi carrée et propre qu'à son habitude, elle ne suffit pas à élever l'intérêt d'un film manquant à la fois d'enjeux, d'intensité dramatique et surtout de direction d'acteurs.
Ni polar ni comédie romantique, Blind Détective est l'une des œuvres hybrides de Johnnie To qui se révèle malheureusement aussi ratée que ses tentatives précédentes.
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