jeudi 10 avril 2014

Un Pistolet pour Ringo (Duccio Tessari, 1965)



Le cruel Sancho (Fernando Sancho) et sa bande de hors-la-loi pillent une banque. Poursuivis par les hommes du shérif (George Martin), ils se réfugient dans une hacienda dont ils prennent le personnel en otage. Le shérif fait appel à un véritable excité de la gachette, Ringo (Giuliano Gemma) pour infiltrer la bande de Sancho et faire libérer les otages.

Duccio Tessari fut un scénariste important, que ce soit dans le peplum ou le western (on lui doit Hercule à la conquete de l'Atlantide ou Pour une poignée de dollars, pour lequel il sera tout aussi absent du générique que ses collègues Tonino Valerii et Fernando Di Leo) mais dont le passage à la réalisation ne s’avéra pas tout à fait à la hauteur des attentes suscitées comme l'illustre assez bien ce Un pistolet pour Ringo. Il s'agit du premier western spaghetti à mettre en scène le héros éponyme, l'un des quatre personnages les plus fréquemment invoqués du genre avec Django, Sabata et Sartana. Chacun possèdera sa personnalité propre : Django est un vengeur, Sartana une sorte de croque-mort et Sabata utilise des gadgets à la James Bond ; Ringo, quant à lui, est le héros le plus ouvertement comique, une sorte de croisement entre l'Homme sans nom leonien et le futur Trinita. Du premier, il reprend l'invincibilité, la rapidité et le cynisme, du second le coté beaucoup plus charmeur, bavard et décontracté. Contrairement à d'autres films réalisés dans les premières grandes années du western transalpin (en gros de 1964 à 1966), Un pistolet pour Ringo est totalement détaché du modèle américain et assume sa spécificité culturelle : outrance, cadavres à la pelle et scènes de torture sont au menu comme dans un bon Sergio Corbucci de base.



Il serait exagéré de voir en Un pistolet pour Ringo un film totalement raté mais il est difficile au visionnage de s'extraite de la forte impression de dilettantisme qui s'en dégage. L'intrigue assez minimaliste (on envoie Ringo chez les méchants et il fait tuer tout le monde) s'enlise au bout d'une demi-heure et part dans des bifurcations aussi incohérentes que longuettes. On verra ainsi naître une histoire d'amour entre la concubine de Fernando Sancho et le propriétaire de la maison assiégée sans que Sancho ne s'en émeuve outre mesure, pas plus qu'il ne s'émeut de voir Ringo lui admettre qu'il est envoyé par le shérif. Privé du mystère qui entoure un héros comme Django, Ringo devient rapidement tête à claques tandis que les innombrables exactions de Sancho - qui consistent le plus souvent à tuer des figurants mexicains - sont rapidement redondantes et tout cela n'est guère transcendé par une mise en scène brouillonne qui abuse des zooms et échoue à instaurer un minimum de tension lors des face-à-face. Il suffit de voir la scène introduisant Ringo, dans laquelle celui-ci abat " en légitime défense " quatre hommes venus l'abattre, pour comprendre que Tessari est plus confiant dans ses idées que dans sa mise en scène. En revanche, l'humour fonctionne parfois ( " Un pistolet, ma vie pour un pistolet... Hum, quelqu'un a déjà du dire ça. " ) et sur ce plan, Un pistolet pour Ringo demeure bien plus regardable que les célèbres " western--fayot " des années 70.


Si Giuliano Gemma est tout à fait à l'aise dans le rôle qui le rendrait célèbre, il est très mal secondé par un casting plutôt faible. Fernando Sancho cabotine au point d'en devenir très pénible tandis qu'au contraire, George Martin en shérif est d'une fadeur à peu près totale peu aidé par l'inconsistance de son personnage. Deux aspects plutôt originaux semblent porter la marque de Tessari : d'abord, les rôles féminins sont beaucoup plus étoffés que dans la plupart des westerns italiens et il est assez agréable de sortir pour une fois d'un machisme il est vrai très coutumier au genre. Ensuite, quelques aspects ne sont pas sans évoquer une actualisation all'italia d'éléments du western traditionnel, comme la balle ricochant sur la cloche qui fait penser au superbe Quatre étranges cavaliers d'Allan Dwan. Une agréable partition d'Ennio Morricone achève de faire d'Un pistolet pour ringo un film tout à fait mineur mais doté d'un réel capital sympathie. Qui a dit qu'on ne devait prendre du plaisir que devant des grands chefs d'oeuvre du cinéma ?

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