dimanche 16 février 2014

Brutal tales of chivalry 3 (Kiyoshi Saeki, 1966)


Shigejiro (Ken Takakura) sort de prison après avoir tué des yakuzas responsables de la mort de son oybaun. Il échappe à une embuscade avec l'aide de Katsuragi (Ryo Ikebe), qui se trouve être l'assassin recherché par Shigejiro. Pendant ce temps, un clan yakuza s'en prend à la fois à un syndicat de pécheurs et à une troupe de théâtre dont fait partie Matsu, un ancien membre du clan de Shigejiro. 

La beauté de ce troisième opus ne vient pas de son scénario qui reprend beaucoup d'éléments des précédents volets et du ninkyo-eiga en général. La relation entre Takakura et Ikebe est ainsi calquée sur celle du deuxième opus en version inversée (c'est maintenant Ikebe et non Takakura le tueur repenti) tandis que le rapport père-fille difficile autour de l'oyabun du bon clan est à peu de choses près identique à celui du premier film. On retrouve de nombreux éléments récurrents (le plan sur Ken Takakura révélant son tatouage, le duel avorté, les séquences de saccage par les mauvais yakuzas, les scènes de recueillement sur une tombe) avec ici une efficacité dramaturgique accrue. Kiyoshi Saeki a l'intelligence de diminuer film après film son héros, insistant moins sur sa qualité de combattant que sur sa bonté humaine et son souhait de compenser ses erreurs passées en prenant soin de son entourage, notamment la veuve d'un de ses amis. Pour le première fois, Ken Takakura est défait en duel - superbe plan sur le visage de l'acteur comprenant que Ryo Ikebe retient ses coups pour ne pas le tuer - ce qui enrichit sa relation avec son vis-à-vis dans le mauvais clan. De même, Saeki fait intervenir son personnage relativement tard et il faut attendre plusieurs meurtres crapuleux et destructions de biens pour qu'il accepte d'aller régler ses comptes ; ce choix d'une catharsis très forte fonctionne mieux que dans les précédents opus grâce à la maîtrise accrue du réalisateur, qui signe ici son plus beau combat final, une très belle réussite du genre.


Si les habituels Takakura et Ikebe connaissent désormais par cœur leurs personnages, apparaît pour la première fois dans la saga Junko Fuji - future Lady Yakuza - très bonne en sœur affectueuse d'Ikebe, ainsi que Tomisaburo " Baby Cart " Wakayama en chef de clan bienveillant. Les bons sentiments sont évidemment toujours là - allergiques s'abstenir - et Saeki dote tous les personnages masculins de regrets et de frustrations divers qui les transforment en figures attachantes et tiraillées ; on note notamment un beau personnage de jeune chef de clan incapable d'empêcher la mort de celle qu'il aimait et un ancien yakuza reconverti dans le théâtre auquel Takakura conseille de rester fidèle aux membres de sa troupe. Il aurait suffit de quelques surprises concernant leurs évolutions respectives pour faire de cet opus un classique, mais les limites narratives propres au ninkyo l'empêchent de décoller dans la mesure ou en dépit de ses qualités formelles et de son excellente direction d'acteurs, on commence à avoir un sentiment de déjà vu trop fort. On craint d'ailleurs pour les épisodes suivants si ceux-ci ne parviennent pas à sortir du canevas narratif des trois premiers.


En résumé, il s'agit d'une sorte de version revue et corrigée des premiers épisodes, qui gagne en efficacité dramaturgique et en qualité de mise en scène ce qu'elle perd en surprise puisque tous les situations demeurent extrêmement prévisibles et attendues. Cependant, un combat final digne de Kenji Misumi et un quatuor d'excellents acteurs font de ce volet le haut du panier du ninkyo pour peu que l'on oublie les sommets d'Hideo Gosha. Peut-être que le remplacement de Kiyoshi Saeki par le vétéran Masahiro Makino pour les épisodes 4 et 5 saura extraire la série de sa routine narrative.


Titre original : Showa zankyo-den : Ippiki okami

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire