Ma mémoire vieillit avec moi aussi j'écris sur des films que je m'en voudrais d'oublier.
mercredi 14 janvier 2015
Point Break (Kathryn Bigelow, 1991)
Un jeune agent du FBI, Johnny Utah (Keanu Reeves) est affecté avec Angelo Papas (Gary Busey), un vieux routier sur la piste d'une bande de braqueurs de banques. Angelo est convaincu du fait que les casseurs sont en réalité des surfeurs. Johnny tente alors d'infiltrer un groupe mené par Bodhi (Patrick Swayze) en séduisant la jeune Tyler (Lori Petty).
Derrière ses apparences de divertissement du dimanche soir, Point Break est l'un des plus beaux blockbusters des années 90 et l'un des meilleurs films de Kathryn Bigelow. On y trouve un certain nombre de similitudes avec Aux frontières de l'aube : un héros tiraillé entre ses origines (sa famille/la police) et sa famille adoptive (les vampires/les surfeurs) ou il fut introduit par une femme (May/Tyler) qu'il tente d'extraire de son milieu. Encore une fois, les " méchants " sont loin d'être monolithiques et si la relation entre Johnny et Bodhi fonctionne aussi bien, c'est parce qu'elle dépasse le simple cadre de la lutte entre un flic et sa proie. Bodhi est ainsi, plus encore que Tyler, la personne qui permettra à Johnny de s'intégrer dans la petite bande ; lorsque celui-ci lui chipe son ex-petite amie, Bodhi ne fait rien pour l'en empêcher et se révèle sincère dans sa démarche proche de l'idéal hippie. Enfin, la magnifique séquence de chute libre montre que même une fois que Bodhi a appris que son protégé n'était qu'un flic infiltré, son empathie ne disparait pas ; la conclusion lui donne en quelque sorte le dernier mot, achevant de faire de Bodhi l'un des méchants de cinéma d'action les plus intéressants. Comme pour Aux frontières de l'aube, le héros revient du monde libertaire sans renier totalement celui-ci ce qui permet au film d'éviter le côté moralisateur.
Encore une fois, la mise en scène de Kathryn Bigelow fait merveille et les divers braquages et fusillades devraient être montrés en école de cinéma. La course-poursuite à pied a justement fait date et globalement Point Break n'a rien à envier aux grands films testostéronés signés Cameron ou McTiernan à la même époque : le film est du début à la fin une merveille de lisibilité. Même hors-action, on trouve régulièrement ici et là d'excellentes idées (le plan-séquence lors de la rencontre entre Keanu Reeves et John C. McGinley) mais Point Break est tout aussi convaincant lors de ses parties romance ou comédie avec notamment un Gary Busey déchainé en mentor policier de Keanu Reeves. Celui-ci demeure le principal point faible du film tant son expressivité limitée n'est pas à la hauteur de ce que ressent son personnage ; l'acteur semble jouer de la même façon dans tous ses films (une exception : sa performance surprenante dans My Own Private Idaho) et se fait voler la vedette dans chacune de ses confrontations avec Patrick Swayze dans son meilleur rôle, touchant, charismatique et ambigu. Les seconds rôles sont également excellents avec un Gary Busey misanthrope, un John C. McGinley tête à claques et une très belle Lori Petty.
On reproche régulièrement à Point Break la simplicité de ses personnages et de ses situations. Mais même un grand film comme Piège de cristal n'est pas exempt de gros clichés (les agents du FBI cyniques et incompétents, le journaliste opportuniste) ; le cinéma d'action repose depuis longtemps sur des archétypes qu'on transpose d'un milieu à l'autre sans opérer de changements radicaux, archétypes qui ne sont pas problématiques pour peu qu'on parvienne à croire dans les personnages. Les surfeurs sont relativement immatures dans leurs idéaux mais on comprend facilement l'attraction que ceux-ci peuvent exercer sur un tout jeune Keanu Reeves en manque de sensations fortes, comme les vampires d'Aux frontières de l'aube ou les motards de The Loveless (autres personnages issus d'une forme de contre-culture) étaient filmés avec une certaine tendresse. Il est difficile de dire quelle fut l'importance de James Cameron, ici producteur, sur le scénario (les éléments liés à la mer et à la fameuse " métaphysique de la vague " semblent porter sa marque) mais quoi qu'il en soit, Point Break est un superbe film aussi agréable à regarder plus de vingt ans après sa sortie.
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