Virgil Jderescu (Teodor Corban), journaliste au sein d'une petite chaine de télévision miteuse, décide de consacrer une émission à la révolution roumaine de 1989. Ses invités ayant annulé au dernier moment, Jderescu les remplace par Emaoil Piscoci (Mircea Andreescu), un vieil homme qui jouait le père Noel le jour de la révolution, et Tiberiu Manescu (Ion Sapdaru), un professeur alcoolique et ancien révolutionnaire.
Si les prétentions politiques de nombreux cinéastes mènent souvent à un prêt-à-penser et un didactisme pénible, l'Histoire se prète en revanche souvent au jeu de la farce avec bonheur. Car 12h08 à l'est de Bucarest n'est ni un drame ni une étude historique mais une sorte de comédie burlesque quelque part entre Rashomon (il est impossible de débusquer la vérité puisque chacun ment en fonction de ses intérêts personnels) et un certain cinéma italien des années 60-70. Point d'héroïsme nulle part, mais si les " révolutionnaires " sont ridiculisés, Porumboiu laisse également entendre que rien n'est blanc dans le camp d'en face (le patron d'entreprise menaçant qui cache visiblement un passé trouble, le journaliste et sa " promotion sociale " miraculeuse) et pour le cinéaste, il est visiblement impossible de trouver une vérité historique dans le fatras d'arrangements que chacun prend avec la vérité pour se justifier.
Le film peut être facilement divisé en deux parties : l'une autour de la présentation des personnages et des circonstances les conduisant à participer à l'émission, l'autre concernant l'émission en elle-même. La première est globalement ratée ; d'abord, parce qu'il ne s'y passe pas grand chose de très captivant et que Porumboiu s'attarde 40 minutes sur son exposition, ce qui est nettement trop long. Ensuite, la pauvreté visuelle y est manifeste et si on ne demande évidemment pas à un premier film d'un jeune cinéaste roumain de rivaliser avec une imagerie hollywoodienne, le manque de dynamisme de la mise en scène (pratiquement tout est filmé en plan fixe) y est souvent gênant.
Il en va tout autrement pour la seconde partie ou l'humour fonctionne impeccablement et ou les grands moments d'absurdité s’enchaînent : les calculs savants de Piscoci pour justifier quelque chose d'injustifiable, l'auditeur nostalgique de Ceausescu, l'engueulade entre un commerçant chinois et Jderescu qui culmine en un racisme absolu, les réactions délirantes de Piscoci qui semble s'intéresser à tout sauf au sujet du débat... A elle seule, cette partie justifie le visionnage de 12h08 à l'est de Bucarest qui sur le plan comique n'est pas indigne des grands films de Kaurismaki, par exemple. Il faut d'ailleurs rendre grâce au trio d'acteurs qui est en grande partie responsable de ce fait (les mimiques de Mircea Andreescu et l'air renfrogné de Ion Sapdaru sont absolument irrésistibles).
Si la deuxième partie ne fait pas de Porumboiu un virtuose de la mise en scène, elle a le mérite de s'articuler autour d'une belle idée (la caméra par laquelle nous suivons l'action est celle du plateau, d'ou de multiples zooms ratés, cadres mal fichus et mains de techniciens dans le champ qui reflètent le capharnaüm sur le plateau) qui fonctionne relativement bien, en dépit du fait qu'elle soit là encore trop étirée (trois quarts d'heure). Quelques minutes avant la fin, Porumboiu change brutalement de registre et réussit un stupéfiant moment de poésie désespérée lors de l'appel d'une mère ayant perdu son enfant lors du conflit. Il est d'autant plus dommage que le cinéaste n'ait pas conclu le film sur ces instants mais sur une séquence métaphorique à base de lampadaires complètement dispensable.
12h08 à l'est de Bucarest est loin de la perfection mais révèle un auteur grinçant et lucide. Les fulgurances comiques de l'interview télévisuel enterrent facilement 95% de nos tentatives comiques hexagonales, et il est agréable de constater que le cinéma roumain ne se limite par à une forme de pamphlet social plutôt sordide que peut représenter Cristian Mungiu. Un beau premier film.
Le film peut être facilement divisé en deux parties : l'une autour de la présentation des personnages et des circonstances les conduisant à participer à l'émission, l'autre concernant l'émission en elle-même. La première est globalement ratée ; d'abord, parce qu'il ne s'y passe pas grand chose de très captivant et que Porumboiu s'attarde 40 minutes sur son exposition, ce qui est nettement trop long. Ensuite, la pauvreté visuelle y est manifeste et si on ne demande évidemment pas à un premier film d'un jeune cinéaste roumain de rivaliser avec une imagerie hollywoodienne, le manque de dynamisme de la mise en scène (pratiquement tout est filmé en plan fixe) y est souvent gênant.
Il en va tout autrement pour la seconde partie ou l'humour fonctionne impeccablement et ou les grands moments d'absurdité s’enchaînent : les calculs savants de Piscoci pour justifier quelque chose d'injustifiable, l'auditeur nostalgique de Ceausescu, l'engueulade entre un commerçant chinois et Jderescu qui culmine en un racisme absolu, les réactions délirantes de Piscoci qui semble s'intéresser à tout sauf au sujet du débat... A elle seule, cette partie justifie le visionnage de 12h08 à l'est de Bucarest qui sur le plan comique n'est pas indigne des grands films de Kaurismaki, par exemple. Il faut d'ailleurs rendre grâce au trio d'acteurs qui est en grande partie responsable de ce fait (les mimiques de Mircea Andreescu et l'air renfrogné de Ion Sapdaru sont absolument irrésistibles).
Si la deuxième partie ne fait pas de Porumboiu un virtuose de la mise en scène, elle a le mérite de s'articuler autour d'une belle idée (la caméra par laquelle nous suivons l'action est celle du plateau, d'ou de multiples zooms ratés, cadres mal fichus et mains de techniciens dans le champ qui reflètent le capharnaüm sur le plateau) qui fonctionne relativement bien, en dépit du fait qu'elle soit là encore trop étirée (trois quarts d'heure). Quelques minutes avant la fin, Porumboiu change brutalement de registre et réussit un stupéfiant moment de poésie désespérée lors de l'appel d'une mère ayant perdu son enfant lors du conflit. Il est d'autant plus dommage que le cinéaste n'ait pas conclu le film sur ces instants mais sur une séquence métaphorique à base de lampadaires complètement dispensable.
12h08 à l'est de Bucarest est loin de la perfection mais révèle un auteur grinçant et lucide. Les fulgurances comiques de l'interview télévisuel enterrent facilement 95% de nos tentatives comiques hexagonales, et il est agréable de constater que le cinéma roumain ne se limite par à une forme de pamphlet social plutôt sordide que peut représenter Cristian Mungiu. Un beau premier film.
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